Le Lavoir de l'Escalère (R. Mosnier)

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Le Lavoir de l'Escalère

Au siècle dernier, notre village rayonnait de nombreux lieux de rencontre où s'accomplissaient, services, entraides, échanges commerciaux dans les boutiques, où s'affichait la Mode de Paris: colifichets, habits,ornements et autres produits, mais aussi conviviaux, il n'y avait ni Internet , ni Télévision et les ondes balbutiantes de la T.S.F. rapportaient une information qui circulait.

 Parmi ces lieux, les hommes se retrouvaient à la forge, aux bistrots, à Bondigoux, il y avait celui des blancs cléricaux et des rouges socialistes. Les femmes se retrouvaient plus volontiers au Lavoir où l'on colportait les « on dit », tout en s'inquiétant de la dureté de la vie, adoucie par une solidarité sans faille entre voisins.

 Le Lavoir de l'Escalère, dont la municipalité a dégagé les abords, comportait deux bassins,subdivisés en compartiment sur deux niveaux, dont subsistent les sub-structures, alimentés par une source à l'eau claire et limpide et un déversoir où s'écoulaient les eaux usées, rejetées dans le Tarn.

 Jean-Louis Gayraud se souvient de mémoire du bâti. Il en représente de façon détaillé,en coupe et en plan,l'aspect.; c'est un édifice de 8 m en longueur sur 5 m de large, recouvert d'une toiture et recevant plusieurs étendoirs pour faire sécher le linge.

C'était une pratique courante d'y aller en famille, laver, puis égoutter, rincer avant d'étendre,parfois dans les champs le linge afin que la rosée du petit matin, accorde cette blancheur éclatante,doublée de cette fraicheur que ne rendent pas nos lessives d'aujourd'hui.

 Enfant, Jean-Louis et ses frères s'ébattaient, jouaient,se désaltéraient, alors qu'agenouillée, sa Mère, à coups saccadés et rythmés de battoir s'affairait à décrasser le linge; les nouvelles du village se propageaient, les secrets réels ou imaginaires se répandaient en écho.

 Le terrain alentour, avait été mis à la disposition de la communauté gracieusement par la famille Teyssere, avec un chemin libre d'accès. De nombreux Bondigounais profitaient de ce droit d'usage.

 Dans les années 60, probablement par manque d'entretien, l'éloignement du bourg, un orage, une tempête eut raison de cet édicule. Monsieur Brousse se souvient que la foudre avait déraciné un vieux chêne, qui en tombant, avait consommé sa ruine.

 Un débat avait eu lieu, au sein du conseil municipal, sur l'opportunité de le relever, mais les lessiveuses avaient fait leur apparition, précédant nos modernes machines à laver, il n'en fut plus question.

 Qu'il était bon, lors des chaudes journées d'été de se désaltérer à la source d'eau vive, retrouver au temps de la moisson et de la poussière qui collait à la peau,cette fraicheur des berges du Tarn et ce linge en lin qui absorbait la transpiration et faisait la fierté des habits du Dimanche.… C'était avant les pesticides, me dit encore d'un air nostalgique Jean-Louis Gayraud.

 Jean-Louis Gayraud & Robert Mosnier